Le cinéma d’horreur est un genre
intérieur. Les giclures d’hémoglobine de Dario Argento ou les déformations
monstrueuses de Cronenberg ne sont que les stigmates sur la pellicule de nos
tensions intérieures. A l’image d’un
volume subissant une différence de pression, la carcasse se déforme, se gonfle, s’étire jusqu'à l’implosion et le couteau
qui viendra la transpercer. Alors se dévoile la chair dans sa nudité, la prégnance
de l’organe et la pesanteur de la peau. Devant nous le mal se dévoile, enfin, et
complètement nu.
Car c’est là où il réside et
c’est là où il faut aller le saisir. Ce qu’exorcisent ces films se trouve en
nous et les productions très cathos/très ricaines qui montrent ce mal comme une
force extérieure dont il faudrait à tout moment se défendre m’ont toujours
semblé très artificieuses pour ne pas dire sans intérêt. Michael Myres et le
reflet de sa lame ne m’ont jamais ébloui
ou ravi de terreur et les films de Romero n’ont jamais eu pour moi qu’un intérêt
simplement politique. La peur viscérale,
celle qui vient des tripes qui à l’écran sont évidées, je ne l’ai finalement
jamais sentie que dans les chefs-d’œuvre des maîtres italien et canadien.
Au lieu de nous plonger un
couteau dans le ventre, de me faire sursauter de frayeur ou écarquiller les
yeux d’horreur, ils ont plongé ma propre main armée dans mon ventre ouvert, à l’image
du héros de Videodrome. Ils ont joué sur
le refoulé, le parricide et l’œdipe dans Rouge
profond d’Argento et dans La mouche
ils ont foulé au pied nos fantasmes de puissance et la peur de la mort et de la
décomposition qu’ils impliquent et qui toujours nous rattrape. Que ça soit dans
l’hyper esthétisation de Suspiria ou le surgissement du fantasme dans le réel et
l’écran de Videodrome, encore une
fois, c’est toujours le reflet du héros
dans la flaque de sang qui m’effraiera plus que son rouge sanglant.
Le mal n’est pas une essence qui
rode comme un fantôme, mais une moisissure qui pourrit à l’intérieur. Et c’est
seulement en sachant cela que le frisson horrifique peut devenir une pétoche métaphysique.
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